Molly Bloom (Jessica Chastain), la plus grande organisatrice de tournois de poker clandestins des Etats-Unis, est arrêtée par le FBI. Elle raconte à son avocat Charlie Jaffey (Idris Elba) son ascension et sa chute, avant son procès.
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Molly Bloom (Jessica Chastain) dans Le Grand Jeu de Aaron Sorkin (2018) |
Skieuse prodige, Molly voit sa carrière brisée après une chute dévastatrice. La jeune femme, dans sa vingtaine, prend une année sabbatique. Elle devient serveuse à Los Angeles le jour, et assistante de l’agent immobilier Dean Keith (Jeremy Strong) la nuit. Keith organise également des tournois de poker clandestins, aux mises élevées, où se pressent des célébrités.
La patte d’Aaron Sorkin
Difficile de parler du Grand Jeu sans mentionner son auteur, Aaron Sorkin, tant le film est imprégné de son style. On touche au premier exploit du plus grand dialoguiste d’Amérique : reprendre l’histoire de Molly Bloom, et se l’approprier, comme il l’avait fait pour celle de Mark Zuckerberg dans The Social Network.
Le succès du film dépend de la question suivante : qu’y a-t-il de Sorkin dans Le Grand Jeu ?
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Aaron Sorkin, scénariste et réalisateur du Grand Jeu |
Sorkin défie toujours les lois les plus élémentaires du scénario. Habituellement, les dialogues viennent en dernier dans l’écriture, après l’élaboration de l’idée originale, des personnages, du synopsis, etc. Or, chez Sorkin, les dialogues contiennent tout :
ils guident la trame.
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Molly Bloom (Jessica Chastain) et Charlie Jaffey (Idris Elba) dans Le Grand Jeu |
Les rebondissements passent tous par le dialogue. La voix off, omniprésente, de l’héroïne qui nous narre sa vie, le pacte avec le diable passé avec Douglas Downey (Chris O’Dowd), les répliques assassines du Player X (Michael Cera, loin des rôles adorables de Juno et Scott Pilgrim) servent de points d’ancrage.
La culture, plus on en a, plus on l’étale
Chez Sorkin, les personnages sont tous d’une érudition folle : littérature, astronomie, économie, histoire… Dès la première scène du Grand Jeu, vulgarisation des techniques de ski, on retrouve la cérébralité parfois précieuse du scénariste, mais toujours jouissive (Sorkin sait s’entourer d’acteurs qui sauront délivrer ses répliques au rythme exact).
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Josiah Bartlet (Martin Sheen), président des Etats-Unis dans la série A la maison blanche, créée par Aaron Sorkin (1999-2006) |
Une scène-clé du Grand Jeu voit Jaffey percer le secret de la personnalité de Molly devant les policiers. Ce sera aussi le cas lors d’une séance de psychanalyse express (avec son père, joué par Kevin Costner), à l’artificialité revendiquée, et cependant brillante. Sorkin évite ici la lourdeur de la rédemption de Steve Jobs dans son précédent film.
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Wes Mendell (Judd Hirsch) pète un câble en direct à la TV dans le pilote de Studio 60 on the Sunset Strip, série créée par Aaron Sorkin (2006-2007) |
Les joueurs de poker dans Le Grand Jeu sont hauts en couleur, de l’idiot du village au manipulateur, en passant par le jeune loup. La prouesse de Sorkin est que chacun de ces personnages, même s’il n’apparaît que deux minutes, est indispensable à l’histoire.
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Le Player X (Michael Cera) dans Le Grand Jeu |
Une nouvelle évolution du style Sorkin ?
Sorkin est connu pour ses productions télévisuelles. 22 ou 42 minutes de dialogue non-stop, ça marche. Sur la durée d’un long-métrage, la surcharge peut lasser. Steve Jobs, qui sombrait dans la virtuosité pure, délaissant histoire et personnages, était la limite de la méthode Sorkin.
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Steve Jobs (Michael Fassbender) dans le film éponyme réalisé par Danny Boyle, et écrit par Aaron Sorkin (2015) |
Les séries de Sorkin sont filmées selon le fameux principe du walk and talk (travelling arrière continu où les personnages dialoguent tout en marchant), méthode compliquée à mettre en place. Mais l’auteur va livrer dans son premier film une mise en scène éloignée de ses séries, pour deux raisons.
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Les mémoires de la vraie Molly Bloom, qui ont inspiré le film |
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Molly Bloom (Jessica Chastain) dans Le Grand Jeu |
Sa Majesté Chastain
Après Zero Dark Thirty et Miss Sloane (très similaire au film de Sorkin), Le Grand Jeu est comme le troisième volet d’une trilogie de « femmes de tête » pour l’actrice Jessica Chastain. Elle signe une nouvelle performance d’anthologie. Trois femmes pugnaces, individualistes, accro au travail et sans vie privée. Elles sont les artisanes uniques de leur destinée, dans le triomphe comme dans l’échec. D’où certains clichés, qui ne le sont qu’en apparence.
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Jessica Chastain dans Miss Sloane, réalisé par John Madden (2017) |
On a souvent reproché à Sorkin une écriture inégale de ses personnages féminins. Dans The Newsroom, la remarquable Sloan Sabbith cohabite avec deux personnages plus faibles : Mackenzie MacHale, hyperactive jusqu’à la caricature (défaut déjà de sa prédécesseure Dana Whitaker dans Sports Night), et Maggie Jordan, trop souvent considérée du point de vue de ses collègues masculins.
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Maggie Jordan (Alison Pill), exemple inabouti de personnage féminin chez Aaron Sorkin dans The Newsroom (2012-2014) |
Un thriller de haut vol
Le Grand Jeu bénéficiait d’une sacré main de départ, ainsi que d’une blinde impressionnante.
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Le casting du film |
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